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jeudi 2 juin 2016

L'espace, le nouveau cheval de bataille des investisseurs de la Silicon Valley

Depuis le succès de SpaceX, les fonds de capital-risque investissent de plus en plus dans les start-up du domaine spatial.

En 2015, le montant levé a été près de deux fois plus élevé que le total des 14 années précédentes. Les fonds de capital-risque ont longtemps considéré le secteur spatial comme trop risqué et lent à produire un retour sur investissement. Mais les montants mis sur la table l'année dernière indiquent qu'ils sont en train de changer d'avis. Selon un récent rapport du Tauri Group , un groupe de consultants en défense et en aérospatial, 1,8 milliard de dollars ont été investis par les « venture capitalists » en 2015, soit 70 % de plus que le total des quatorze précédentes années.

Trois start-up spatiales étaient créées chaque année en moyenne au début des années 2000, ce chiffre est monté à 8 depuis cinq ans. La majorité des fonds levés l'année dernière est allée à Space X , créé par Elon Musk en 2002, et OneWeb, lancé par Greg Wyler. Surtout connue pour ses fusées ré-utilisables, Space X a annoncé début 2015 se lancer dans la production de satellites. Il s'est fixé comme objectif d'envoyer 4.000 mini-satellites à 1.200 kilomètres de la Terre d'ici à 2030. OneWeb s'est, lui, associé à Airbus pour lancer une constellation de 900 petits satellites.

Le secteur des nano (entre 1 et 10 kg) et micro (entre 10 et 100 kg) satellites envoyés en orbite basse, à moins de 2.000 kilomètres d'altitude, est en plein boom. Il a été poussé par la révolution des « Cubesats », des satellites de la taille d'un cube de 10 cm d'arête créés en 1999 par l'université de Standford et l'université Polytechnique de Californie.

Le nombre de satellites pesant entre 1 et 50 kg lancés dans l'espace a ainsi augmenté de 39 % chaque année entre 2010 et 2015, pour atteindre 131 lancements l'année dernière, selon une étude de SpaceWorks.

La majorité des usages des start-up du secteur (Planet Labs, Spire...) tourne autour de la capture d'images de la surface de Terre. Le nombre élevé de satellites permet de prendre plusieurs photographies de la Terre au même moment et beaucoup plus fréquemment que des concurrents reposant sur des gros satellites comme DigitalGlobe.

Ces images constituent des données précieuses pour surveiller l'évolution des ressources naturelles (pétrole, mines), aussi bien que les récoltes ou la déforestation. Plusieurs autres jeunes pousses (Descartes Lab, Orbital Insights, SpaceKnown) misent donc elles sur l'exploitation de ces Big Data.

Les investisseurs sont également encouragés par plusieurs sorties réussies, qui ont prouvé la possibilité d'obtenir des retours sur investissements élevés. Quand Skybox Imaging, un fabricant de micro-satellites, a été racheté par Google en 2014 pour 478 millions de dollars, les fonds ont récupéré 5,3 fois leur mise. Mais le plus gros retour sur investissement (8,5 fois) concerne Climate Corporation, une société exploitant les données des satellites sur la météo pour les agriculteurs, rachetée 930 millions de dollars par Monsanto en 2013.

Jean-Jacques DORDAIN, ancien directeur général de l'Agence Spatiale Européenne précise : "Ces deux mondes ont de plus en plus d'intérêts et d'objectifs communs pour innover ensemble. Les Gafa ont bien compris que le spatial est le seul vecteur qui leur permet d'aller chercher légalement des données partout dans le monde et de les redistribuer, sans passer par des autorisations gouvernementales.

Maintenant, le monde de l'espace doit aussi s'intéresser au acteurs du digital. Prenez l'exemple de la météo : il a fallu dix ans pour que les services météo ne s'emparent des données fournies par les satellites. Mais, aujourd'hui, les météorologistes ne peuvent plus se passer de l'espace et sont les premiers à réclamer la troisième génération de satellites météo en orbite géostationnaire.

Le succès des constellations de satellites lancées par la Commission européenne, Galileo (géolocalisation) et Copernicus (observation de la Terre), ne se mesurera pas au nombre de satellites en orbite mais à l'aune des services générés au sol. Je suis optimiste : l'avenir du monde spatial dépend de sa capacité à travailler avec d'autres secteurs, comme le digital, et nous n'en sommes qu'au tout début de l'utilisation de l'espace pour faciliter la vie sur Terre".

Vu dans Les Echos (Anaïs MOUTOT)

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